Contrôle des exportations

L’Arrangement de Wassenaar

Un régime de contrôle des exportations d’armements et de biens à double usage conventionnels

L’Arrangement de Wassenaar est un arrangement multilatéral global pour le contrôle des exportations d’armements conventionnels et de biens et technologies à double usage servant à leur fabrication. Il a été conclu en juillet 1996 par 33 États et tire son nom de la localité de Wassenaar, aux Pays-Bas. Il regroupe aujourd’hui 42 États.

L’Arrangement de Wassenaar vise avant tout à promouvoir "la transparence et une plus grande responsabilité dans les transferts d’armes et de biens à double usage afin de prévenir les accumulations déstabilisantes". Il complète et renforce les régimes existants de non-prolifération des armes de destruction massive. Les États parties à l’Arrangement doivent s’assurer que les transferts d’armes et de biens et technologies à double usage conventionnels qu’ils effectuent ne contribuent pas au développement ou au renforcement de capacités militaires pouvant nuire à la sécurité et à la stabilité régionales et internationales.

Un forum politique et technique

La nature juridiquement informelle de l’Arrangement de Wassenaar repose sur un engagement politique exprimé dans des éléments initiaux et des textes ou déclarations complémentaires adoptés à l’unanimité par les États participants. Toutes les décisions au sein de l’Arrangement de Wassenaar sont prises par consensus.

Sur le plan politique, les États se sont engagés à :

  • suivre les "directives", "éléments" et "meilleures pratiques" adoptés par l’Arrangement de Wassenaar ;
  • contrôler en vertu de leur législation nationale les exportations de biens figurant sur la liste militaire et la liste des biens à double usage de l’Arrangement ;
  • rendre compte, par souci de transparence, des transferts d’armements conventionnels et de biens à double usage jugés très sensibles, ainsi que des refus de transfert de biens à double usage en général ;
  • échanger des renseignements sur les exportations de biens et de technologies à double usage très sensibles.

Le secrétariat permanent de l’Arrangement de Wassenaar est situé à Vienne et comporte une douzaine de personnes. L’assemblée plénière se réunit une fois par an et ses organes subalternes se réunissent régulièrement.

En fonction de l’évolution des technologies, le groupe d’experts met à jour chaque année les listes de contrôle. La liste militaire de l’Arrangement de Wassenaar est notamment reprise dans la liste militaire commune européenne des équipements militaires et la liste des biens à double usage est transposée dans le règlement communautaire sur le contrôle des exportations de biens et technologies à double usage (Règlement (CE) 428/2009). Le contrôle à l’exportation demeure de la souveraineté de chaque État participant.

Les biens et technologies à double usage

Un "bien à double usage" est un produit ou service "susceptible d’avoir une utilisation tant civile que militaire", c’est-à-dire généralement destiné à un usage civil, par exemple dans l’industrie, mais pouvant également servir à développer des armes ou matériels militaires. À ce titre, son exportation n’est pas interdite a priori mais fait l’objet d’un contrôle, généralement sous la forme d’une obligation de licence. Certains biens ou technologies à double usage sont susceptibles d’avoir une utilisation militaire conventionnelle, d’autres peuvent servir à la fabrication d’armes de destruction massive : armes nucléaires, chimiques ou biologiques ou encore missiles capables d’emporter de telles armes.

Le contrôle des exportations de biens et technologies à double usage repose juridiquement, en France comme dans les autres États membres de l’Union européenne, sur un règlement communautaire (désormais le règlement CE n° 428/2009 du 5 mai 2009). Ce règlement définit notamment les différents types de licence à l’exportation et fixe la liste des biens concernés. Les contrôles s’appliquent à toutes les exportations vers des territoires extérieurs à l’Union européenne. À l’exception de certains biens très sensibles inscrits sur une liste spécifique annexée au règlement, les transferts à l’intérieur du territoire communautaire ne sont pas soumis à ces contrôles.

Le Traité sur le commerce des armes

Le 2 avril 2013, l’Assemblée générale des Nations unies a adopté à une très large majorité le Traité sur le commerce des armes, premier instrument universel juridiquement contraignant visant à réglementer le commerce des armes classiques et à lutter de manière globale contre les trafics illicites d’armements, et prévenir ainsi les conséquences dramatiques sur les populations civiles.

Le Traité s’applique à l’ensemble des armes classiques telles que définies par le Registre des Nations unies, y compris aux armes légères et de petit calibre. Il prévoit que les États parties mettent en place les outils juridiques et les dispositifs pratiques permettant le contrôle des flux de matériels militaires ainsi que des pièces et composants qui leur sont associés.
Il impose également aux États d’interdire tout transfert qui aurait pour conséquence la violation d’une résolution du Conseil de sécurité des Nations unies, le non-respect par un État de ses obligations internationales, la commission des crimes internationaux (dont les crimes de guerre et les crimes contre l’humanité), de graves violations des Conventions de Genève, ou encore d’attaques dirigées contre des populations civiles ou des biens civils protégés tels que définis par les accords internationaux. Les États devront également subordonner l’exportation d’armes à la délivrance d’une autorisation préalable. Les demandes d’exportation seront notamment refusées s’il existe un risque prépondérant que les armes soient utilisées pour commettre de graves violations du droit international des droits de l’Homme et du droit international humanitaire.

La France a signé le traité le 3 juin 2013 à New York avec 66 autres États, parmi lesquels 24 États membres de l’Union européenne. La France, qui dispose d’un dispositif rigoureux de contrôle de ses transferts d’armements, se conforme d’ores et déjà à l’ensemble de ces dispositions.

La Position commune de l’Union européenne

Le Conseil de l’Union européenne a adopté, le 8 décembre 2008, une Position commune 2008/944/PESC « définissant des règles communes régissant le contrôle des exportations de technologie et d’équipements militaires ». Ce document, publié au Journal officiel de l’Union européenne, définit une liste de critères que les États membres doivent prendre en compte lors de l’examen des demandes d’exportation qui leur sont soumises par leurs entreprises. Au travers de l’adoption de cette position, le Conseil donne à la politique de contrôle des exportations un caractère juridiquement contraignant.

La position commune a deux finalités :

  • promouvoir les principes de transparence et de responsabilité de la part des pays exportateurs d’armements pour ce qui concerne les transferts vers des pays tiers : La notification aux partenaires des transactions refusées ainsi que les consultations qui en résultent répondent à cette exigence. Le rapport annuel sur les exportations d’armements est une conséquence directe de la mise en œuvre de la Position commune. En outre, les États membres sont tenus de transmettre chaque année au Secrétariat général du Conseil de l’UE des données très précises sur leurs exportations d’armements
  • faciliter la convergence des politiques d’exportation de matériels de guerre des États membres.

Les échanges menés dans le cadre de la PESC sont d’autant plus fructueux que les États européens sont souvent amenés à contrôler des projets d’exportation similaires. La Position commune reprend, en les précisant, les huit critères du Code de conduite que les autorités nationales de contrôle doivent respecter pour l’examen des demandes d’autorisation déposées par les industriels.

La décision d’accepter ou de refuser une exportation demeure de la seule responsabilité de chaque État. La position commune expose toutefois un État membre qui ne respecterait pas ces directives, par exemple en s’affranchissant du respect des procédures de transparence, ou en ne respectant pas les critères énoncés par la Position commune (et notamment le critère du respect des droits de l’Homme), à des sanctions politiques et diplomatiques décidées par l’Union européenne.
Le régime de contrôle des exportations des matériels de guerre et matériels assimilés en France

Le régime de contrôle des exportations des matériels de guerre et matériels assimilés a été profondément rénové en 2012 et 2013 dans le cadre de la loi n°2011- 702 du 22 juin 2012 entrée en vigueur le 30 juin 2012, en application de la directive européenne sur les transferts intra-communautaires (directive 2009/43/CE du 6 mai 2009 dite « directive TIC », voir plus loin).

La France a profité de ces travaux de transposition pour mener également une vaste réflexion sur ses processus de contrôle des exportations de matériels de guerre et assimilés hors Union européenne, qui n’entrent pas dans le champ de la directive et restent donc totalement de sa compétence. Ses dispositions, de même que celles de l’un de ses décrets d’application, sont codifiées dans le Code de la défense, qu’elles modifient (notamment dans le titre III du livre III de la partie 2 de la partie législative).
Cette loi introduit deux nouveaux concepts dans notre réglementation. D’une part, elle distingue désormais les transferts intracommunautaires (TIC) régis par les dispositions de « directive TIC », qu’elle transpose, et les exportations hors de l’Union européenne (UE) pour lesquels les États restent libres de définir les principes de contrôle et que la France a choisi de réformer profondément.

D’autre part, elle crée trois types de licences d’exportation ou de transfert intracommunautaire : les licences générales, et les licences individuelles ou globales. Elles peuvent être assorties de conditions. Les transferts intracommunautaires de matériels mentionnés à l’article L.2335-18 du code de la défense (satellites de défense et leurs composants) font l’objet « d’autorisations préalables de transfert ». En dépit d’une base juridique différente, les licences utilisées pour ces matériels sont les mêmes. Elle ne supprime pas bien sûr le contrôle des importations en provenance des pays tiers à l’Union européenne.

L’évolution du régime de contrôle doit permettre de répondre aux attentes des opérateurs économiques par la mise en place d’un système de licences plus facile à utiliser tout en assurant une égale robustesse en matière de contrôle. Par ailleurs, le fonctionnement de la Commission interministérielle pour l’étude des exportations des matériels de guerre a été adapté à la nouvelle réglementation et optimisé pour assurer plus efficacement l’examen des demandes de licences d’exportation et de transfert intracommunautaire.

Les dispositions du décret n° 2012-901 du 20 juillet 2012, instaurant la licence unique, entreront en vigueur début 2014.

La directive TIC

La « directive TIC » maintient le principe d’une autorisation de transfert vers les États membres de l’UE pour des matériels qu’elle liste dans son annexe et dénomme « produits liés à la défense ». La France a décidé d’ajouter à ce périmètre les satellites, lanceurs et leurs composants ; ceux-ci sont traités selon une procédure identique.

La directive simplifie de façon décisive les contrôles à plusieurs titres :

  • les États membres de l’Union européenne ne peuvent plus, sauf exception, exiger d’autorisation d’importation de matériels de guerre (AIMG) pour les « transferts intracommunautaires entrants » comme c’était le cas antérieurement à l’adoption de la directive ;
  • des licences générales de transfert (LGT) sont instaurées, quatre étant prévues obligatoirement par la directive, afin de permettre à des fournisseurs communautaires (entreprises, services étatiques…) remplissant certaines conditions de transférer, sans autorisation préalable, des produits liés à la défense listés par la LGT vers des destinataires communautaires selon des critères fixés par la directive ;
  • des mécanismes de licence globale et individuelle accordée par l’autorité nationale à un fournisseur identifié, permettant le transfert sur le territoire d’un des États membres de l’Union européenne ;
  • une certification des entreprises destinataires des transferts : délivrée pour une durée limitée par les autorités nationales de chaque État membre pour des entreprises établies sur son territoire, la certification vient attester suivant le respect de critères généraux définis par la directive et repris par les États membres - la capacité générale de l’entreprise à respecter les restrictions concernant l’utilisation finale ou l’exportation des produits liés à la défense reçus au titre d’une licence de transfert d’un autre État membre, et par-là même le respect des prescriptions attachées aux licences, gage de la confiance mutuelle entre États membres ;
  • un mécanisme de contrôle des restrictions à l’exportation (hors Union européenne) qui contraint les entreprises à respecter scrupuleusement ces conditions imposées sur leurs matériels lors du ou des transferts précédents et à attester à l’État exportateur qu’elles sont en règle au regard de ces obligations ;
  • un processus de contrôle a posteriori a été instauré, afin que la plus grande fluidité des transferts au sein de l’Union européenne, permise par la directive, ne nuise pas à l’efficacité du contrôle.

Transparence à l’égard de la communauté internationale et civile

Dans le domaine des exportations d’armements, la France s’inscrit dans une dynamique de transparence à l’égard de la communauté internationale et de la société civile. Outre des informations sur son dispositif national de contrôle de la production et du commerce des armes (réglementation et procédures administratives), elle communique également des données sur ses transferts d’armements.

Notre pays participe ainsi au Registre des Nations Unies sur les armes classiques, mis en place en 1992, en communiquant chaque année les informations relatives aux exportations, importations, dotations de ses forces armées et achats liés à la production nationale.

La France transmet par ailleurs des informations à ses partenaires de l’Arrangement de Wassenaar (exportation d’équipements militaires et de certains à biens à double usage) et de l’Organisation pour la Sécurité et la Coopération en Europe (importation, exportation et destruction d’armes légères et de petit calibre ; rapports sur les procédures nationales de contrôle).

Enfin, la France participe pleinement aux mécanismes d’échanges d’information mis en place sein de l’Union européenne (COARM, système de notification des refus, contribution nationale au rapport annuel de l’Union européenne).

Au niveau national, depuis 1998, l’information sur les exportations d’armement de la France est illustrée par la publication du rapport annuel au Parlement, présenté par le Ministre de la défense aux membres des commissions en charge de la Défense et des forces armées de l’Assemblée nationale et du Sénat. Très largement diffusé,le rapport bénéficie de la mise en ligne d’une version électronique sur le site du ministère de la défense.

De même les ministères des affaires étrangères et de la Défense entretiennent un dialogue régulier et de qualité avec l’ensemble des acteurs de la société civile concernés par les questions relatives aux exportations d’armement soit directement soit indirectement par le biais de la représentation nationale au travers des questions parlementaires.

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Dernière modification : 22/05/2019

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